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Conversation avec ICHON, rappeur moderne

Pas loin de la mer bleue, entre deux chapiteaux, nous sommes allés rencontrer le rappeur Ichon lors de sa date au festival Cabourg Mon Amour pour parler de son projet à venir « Il Suffit de le Faire ». L’occasion d’explorer sa philosophie, sa musique, ses émotions d’artiste et sa confiance en un avenir déjà jonché de projets et de dates de sorties.

 

TRENDS – Tu t’étais déjà présenté pour TRENDS l’an dernier au moment de la sortie de ton projet #FDP, qu’est ce qu’il s’est passé de beau depuis ?

ICHON – J’ai préparé un nouveau projet, une grosse mixtape de 18 titres qui va sortir en Octobre si tout se passe bien. J’ai bossé beaucoup avec Bon Gamin, on a fait une grosse tournée ! Enfin, c’était notre première tournée donc, pour nous c’était assez gros !

On avait quand même a peu près une date par semaine depuis Avril. On a beaucoup tourné, on a fait beaucoup de sons ensemble, on a ouvert officiellement le label Bon Gamin…

T – Ah, vous allez recruter des artistes ?

I – Alors, oui. Déjà y’aura nous. (rires) Après, ça sert à rien que j’en dise plus pour l’instant parce que c’est pas encore assez concret, mais ouais, ça va nous permettre de sortir nos propres projets, concrètement.

Depuis, je suis aussi en management avec Savoir Faire, j’ai un tourneur qui s’appelle Live Nation, donc je suis bien entouré et j’ai toutes les cartes en main… Voilà, il suffit d’être un fils de pute pour le faire tu vois !

T – Tu vas sortir la mixtape Il Suffit de Le Faire. Au moment de l’interview, tu m’avais dit que c’était un pont entre Cyclique et #FDP.

I – Ouais, c’était un peu un souhait mais en fait, non, ça veut rien dire. C’est un pont dans le sens où y’aura moins de gros mots quoi, ahah tu vois ? Je cherchais un peu plus de poésies et de mélodies, chose que je j’explorais davantage dans Cyclique. C’était mon souhait, mais en soit, non, c’est pas réellement un pont.

T – #FDP, c’est un peu un pétage de cable, le moment où tu t’es mis à crier, non ?

I – Ouais, c’est un peu ça. Après, ça a toujours été en moi. J’aurais jamais souhaité jouer ce personnage à la base sauf qu’en fait, il me va très bien. Finalement, quand je parlais de « pont », c’était pour dire : j’accepte ce côté fils de pute que j’ai en moi, Cyclique fait partie de moi, et ce prochain projet servira à lier les deux.

T – Je ne peux pas m’empêcher de parler de ta team, puisqu’au-delà de Bon Gamin, il y a aussi des gens avec qui tu collabores souvent, Muddy Monk, Bonnie Banane… C’est quelque chose de très rare dans le rap français, milieu où beaucoup évoluent solo, ou avec leur DJ. Qu’est-ce que t’apporte cet esprit d’équipe ?

I – En fait, ça m’apporte de la bonne musique. Ca m’amène vers des choses que je n’aurais pas forcément exploré moi-même, et ça me donne du courage et de la confiance en moi. Ce sont des gens dont j’aime le travail et que j’inspire aussi, donc on s’inspire mutuellement et ça me donne confiance, tu vois. C’est bien d’être entouré de gens qui nous donnent de la force tous les jours. C’est ça que ça m’apporte. T’as Loveni, Myth Syzer, Bonnie Banane, Muddy Monk, Jeune LC… on va dire que c’est le noyaux dur de mon entourage.

T – Ca apporte une qualité dans le sens où un rappeur classique ne va s’enfermer que dans le rap. Là, vous avez quand même des influences qui viennent de partout, et des personnages qui veulent se renouveler en permanence.

I – C’est exactement ça. On fait tout à l’instinct, tout. Hier, Syz’ (Myth Syzer) m’a envoyé un son, il chantait dessus, il restait de la prod et je l’ai fait. C’est tout, c’est comme ça que ça marche. Pareil pour Bonnie Banane, Lov’, Muddy Monk… C’est que de l’instinct. Et ça devrait arriver plus si on voulait vraiment travailler le fait de s’asseoir en studio et de bosser des morceaux, mais on préfère être seul, chacun de notre côté, pour ensuite partager et créer. C’est comme ça que j’aime faire de la musique, quelque chose de personnel.

T – On t’a vu dessiner des vêtements, coudre, rapper, chanter… est-ce que d’autres horizons t’attirent ?

I – Ouais forcément. Forcément… (rires) On va tout faire mon pote.

T – Je vais te poser une question plus dangereuse.

I – Tu vas me parler des views ?

T – Exactement. Vous faites des clips avec des lévriers afghans, des choses osées avec des images splendides, et il y a ces views qui ne montent pas ou peu. Ton état d’esprit par rapport à ça ?

I – Je suis assez satisfait des vues qu’on fait, franchement. J’aimerais bien sûr en faire plus, pour pouvoir toucher plus de gens, jouer plus, vendre plus etc. Mais franchement, je suis archi content des vues qu’on fait. Des gens sortent des sons et font des 3k views, d’autres 20k… Petit à petit, on avance. L’an dernier, je faisais 50k. Maintenant, je fais 200k, l’an prochain ce sera plus… et c’est comme ça.

T – C’est presque la meilleure formule. Puisque votre fanbase grandit doucement mais reste très soudée.

I – Justement, on en parlait hier avec Fabien, un ami. Et j’espère que ce sera comme ça. Je suis pas dans la tête des gens, mais si ça pouvait avancer comme ça, ce serait un truc de ouf.

T – La vie d’artiste, c’est quelque chose de précaire et sûrement rempli d’incertitudes, j’imagine. C’est vivable au quotidien ?

I – Bah non, c’est dur. Parfois on manque de devenir fou.

T – A ce point là ?

I – Ah oui, clair. Il y a l’incertitude parce qu’on se saigne, qu’on se ronge le cerveau et qu’il n’y a que comme ça qu’on sait le faire. Je ne sais que raconter ce que je vois, ce que je vis… et puis comme je vise une carrière, il y a ces histoires avec les gens qui t’entourent, les choses que tu croyais, et qui en fait ne sont pas comme ça, où tu apprends qu’un tel a dit ça… y’a plein de choses qui peuvent te rendre un peu fou. En plus, comme on a de gros égos, on se demande si on n’est pas des gros connards… du coup tu vas faire un coup de connard à quelqu’un, et en fait tu voulais pas… Bref, comme tout le monde je pense. Mais, comme nous on le vit à 100% et que c’est que ça notre vie, on peut en souffrir. Mais quand on est heureux, on est super heureux.

T – C’est pas une lutte permanente pour pas devenir un gros connard, d’ailleurs ?

I – J’y pense de temps en temps, mais je crois que quand t’es un connard, t’es un connard. Même sans être connu. Franchement, je pense pas que je pourrais être un connard. Avec les parents que j’ai, les amis que j’ai, c’est impossible. Le jour où je vais devenir un connard, on va me cracher à la gueule, arrêter de me répondre… je finirais forcément par me remettre en question, c’est sûr. Je peux pas.

T – Tu m’as parlé de votre tournée. Je vous ai vu vous produire dans des petites scènes, comme le Batofar… ça fait quoi maintenant, de jouer devant plusieurs milliers de personnes ?

I – Mec, c’est un truc de ouf. Les Eurocks, c’était mon moment préféré. Y’avait, combien, 10000 personnes ? C’était incroyable et on s’attendait pas à ce qu’il y ait autant de monde parcequ’on jouait à 18h juste avant Alkpote, en même temps que Gucci Mane et PNL. On n’était pas sur la plus grande scène et au final on a eu plein de monde. Ca a grave plus aux gens qui nous connaissaient pas… et du coup ça rassure les gens qui ont cru en nous, et ça nous rassure parce qu’on se dit qu’on peut le faire sans transpirer, sans flipper mec. Parce qu’en vrai, tu t’imagines plein de choses alors que quand t’es là, c’est juste magnifique. Au final, tu sais quoi, on a joué dans une prison avant.

T – Ah ouais ? Des gens qui vous connaissaient ?

I – Bah non. T’imagines en son-pri, Belfort, les gens ils écoutent PNL tu vois ce que je veux dire ? (rires) Ils nous connaissent pas une seconde, ils écoutent Booba, PNL, Lacrim ou Jul et ils voient arriver deux blancs et un renoi habillés genre… ils ont rien capté ! Et ils ont kiffé de ouf, on a parlé pendant 45 minutes, ils se sont pris l’énergie, ils nous ont donné des conseils, on a parlé normal et c’est juste ça. On a joué dans la cour, tu sais, la promenade… et les gens étaient là, ils faisaient leurs pompes, c’était pas comme si il y avait un public ou quoi, certains étaient contre le mur, assis sur des bancs, ils passaient leurs coups de fil… mais après chaque morceaux ils applaudissaient, ils écoutaient ce qu’on avait à dire, et à la fin ils sont venus nous parler en nous félicitant.

T – Vous êtes écoutés sur Soundcloud en prison maintenant.

I – Ouais et, attend, avant on faisait les balances (ndr : le réglage son), ils étaient dans leurs cellules et ils mettaient nos sons à fond ! Parce qu’ils ont internet, ils ont des téléphones alors qu’ils ne sont pas censés en avoir… ils criaient : « AÏE AÏE AÏE, BON GAMIN », et ils étaient contents, tu vois.

Tout ça pour dire que c’est lourd, la scène, c’est un truc de ouf. Après, on a eu des mauvais moments aussi. Rien de vraiment négatif mais des trucs où t’espères que ça va fonctionner, qui ne fonctionnent pas spécialement et qui font que tu fais juste ta musique et que tu te casses quoi. Mais, on a plus de bons souvenirs que de mauvais.

T -Vous aviez une idée de votre public avant de le rencontrer ? Elle est conforme à ce que vous aviez imaginé ?

I – Ouais, je crois qu’il est cool et éclectique. Il y a des meufs, des gars, des gens de 30 piges, des gens de 40 piges, les darons et les daronnes s’y retrouvent quand même… au final, ceux qu’on n’atteint pas, c’est les enfants, ceux de 12 piges, ce qui est rassurant dans un sens.

T – Une date de sortie pour « Il Suffit De Le Faire » ?

I – Pour l’instant, la date est fixée au 21 octobre. Après, en vrai je devais le sortir en avril (rires). Mais sincèrement, je pense et j’espère que ça sortira à ce moment-là. Tout est prêt.

T – Et Bon Gamin, on sait pas ?

I – Bon Gamin on sait pas ! (rires) Mais comme d’habitude, comme depuis toujours, il y a des tonnes de morceaux. Un jour on sortira un album, et j’espère d’ailleurs que cette histoire de label nous forcera à le faire. J’espère qu’en Mars/Avril prochain on sortira l’album de Bon Gamin. Myth Syzer sort son projet « Bisous EP » dans les mois qui viennent, et j’espère que Lov’ (Loveni) va sortir son truc.

T – Sur ce projet qui vient, on abandonne la violence ? Que du blue ?

Non. Non non non (rires) Le bleu, ce sera pour l’album. Pour l’instant, c’est solaire. « Il Suffit De Le Faire » quoi, lève-toi, va le faire, c’est ça l’idée.

T – Et c’est quoi alors, « le blue » ?

I – C’est le bonheur. C’est juste une métaphore que je me suis fait quand j’étais triste et que j’étais plus jeune, là où tu cherches toujours des métaphores pour imager ta vie. J’ai mélangé plein de trucs, « Touch the sky », « Sky’s the limit », le bleu, la mer, avant de me rendre qu’il y avait même des philosophes qui parlaient du bleu, et aussi des peintres avec Yves Klein et d’autres… j’ai vu que le Bleu, ça existe vraiment. Pour moi, ça signifie juste la plénitude.

J’étais en vacances en Grèce et, le ciel, la mer, tout est bleu là-bas. Tes yeux sont calmes. Tu respires. C’est ce que j’ai voulu dire par là.

T – Je vais te parler de mode, même si j’ai l’impression que tu n’aimes pas trop en parler.

I – Non, je m’en fous en fait. Ce que je n’aime pas, c’est les cases. Donc j’aime bien dire que je m’en fous parce que j’ai pas envie qu’on dise « Ouais Ichon, le rappeur de la mode ! ». C’est relou, tu vois ce que je veux dire ? Quand ils parlent de rappeurs de la mode, ils parlent de Travi$ Scott etc, sauf que je ne me sens pas du tout comme ce genre de personne.

T – En vrai, y’a pas vraiment de style en France.

I – C’est ça et, j’aime bien m’habiller, j’ai toujours fait mes fringues, et j’ai eu la chance de faire du mannequinat parce que ça m’a fait du cash. J’ai rencontré le créateur de Pigalle, de Jour/Né, d’Avoc… j’ai été mannequin pendant trois ans chez Margiela, du coup j’ai connu plein de gens. Et ça m’intéresse vraiment de faire des vêtements. Ce qu’il faut se dire, c’est que je te dirais toujours « Je m’en fous » comme quand on me demande ce que je pense du Rap Game.

T – C’est politique ?

I – Exactement.

T – Est-ce que l’année 2017 était meilleure que l’autre ?

I – Ouais, ouais, je crois, elle était pas mal hein.

T – On te souhaite quoi pour 2018 alors ?

I – Qu’elle soit la même en mieux. En vrai de vrai, je veux juste sortir mes trucs, parce que j’en ai tellement. Je veux sortir mes trucs et ça fera le taff, j’en suis sûr.

 

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