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Interviews

Akhenaton, l’interview exclusive pour TRENDS periodical

On ne le présente plus. Le rappeur Akhenaton s’est livré lors d’une interview à TRENDS periodical, sur le thème du lifestyle, et des influences du MC.

C’est l’une des légendes du rap en France. Akhenaton, le leader charismatique du groupe I Am nous a fait l’honneur de nous accorder une interview. Sans jamais compter les minutes, et avec beaucoup de passion, le marseillais a analysé son actualité et celle du Monde avec un angle qui nous est propre, celui du lifestyle, et des sujets qui ont marqué sa carrière.

Entre musique, politique, influences et voyages, c’est un Akhenaton très détendu, comme vous l’avez rarement vu, qui s’est livré aux équipes de TRENDS periodical. Un régal pour tous les amoureux de hip hop, dont nous sommes.

La deuxième partie de l’interview est disponible en cliquant ici.

On ne te présente plus, tu es rappeur, écrivain, réalisateur, et quand on tappe ton nom sur Google tu arrives avant le Pharaon, quel effet ca fait ?

C’est ce que le chef de la police d’ile de France avait dit, a cause de moi les petits ne savent pas qui est Akhenaton, je rappellerais a monsieur Beschizza qu’il y a toujours des livres d’histoires dispensés dans certaines écoles et certains musées, et que les enfants peuvent toujours consulter. C’est un regret pour le pauvre pharaon, mais je ne représente pas grand chose à côté de lui au vue de l’histoire, et aux vues des dernières découvertes archéologiques.

2014 est une excellente année pour toi avec une tournée en cours avec I AM, et un album solo, « Je suis en vie » : comment  germé l’idée d’un retour en solo ?

L’idée n’a pas germée dans ma tête, pour dire la franche vérité ca a été une proposition de la maison de disque. Nous on était dans une position avec iam et on faisait notre dernier album, et on n’était pas re signé. On s’était vu entre nous et on s’était dit « a 45 ans si on continue a faire des albums en indépendant, ca va finir en dispute de vieux cette histoire ! » Dans Iam il y a de grosses têtes dures, tout le monde a ses avis, et il faut pas basculer ! Les aventures d’indépendant c’est bien quand tu es jeune et que tu n’as pas un nom installé. Le public ne comprends pas quand tu sors des projets qui sont dans des budgets moindres. Les gens veulent des clips de « La saga » en 35 mm, ils veulent des trucs qui brillent et d’un coup toi tu as pas un rond et tu dois t’occuper en plus de la fabrication … on voulait pas, on veut faire que de la musique. Faire un album en indépendant aujourd’hui ca veut dire avoir plein de contraintes. Et donc on était dans cette optique et la maison de disque m’a appelé et m’a dit « Est ce que ca te branche si en plus d’I Am on te produit un album solo ? », j’ai dit « vraiment ca me plairait » mais ils me disent « par contre il faut le sortir au mois de novembre 2014 » et on était en avril. J’ai dit « vous êtes sur que … 5 mois pour faire un album ? », alors il faut savoir que ce sont des questions de fenêtre, Def Jam ils ont beaucoup d’artistes internationaux et en novembre il y avait une possibilité de sortir, après c’était beaucoup plus compliqué. Dans un premier temps j’ai dit non. J’ai dit « non, c’est pas possible, j’ai zéro textes, zéro musiques, c’est impossible en 5 mois d’arriver à faire un album » et dans mon entourage, à la fois dans le groupe et Aïcha qui est mon manager et ma femme aussi, tous m’ont dit « mais si tu avais 20 ans et Def Jam te proposais de faire un album, qu’est ce que tu dirais ? » eh bien je dirais « oui » tout de suite. « Eh bien tu te plains d’être en indépendant et de ne pas pouvoir travailler et là tu as un album ou tu as enfin les moyens de pouvoir enregistrer comme tu veux, de pouvoir mixer comme tu veux, d’être dans des grands studios, de faire quelques clips, faire des trucs ! » Et j’ai dit c’est vrai, parfois je manque vraiment de courage, tu sais des fois tu es dans ton petit confort, dans ta petite tournée, tu fais des dates, tu fais du sport … Je suis passé a autre chose.

En 2001 tu as écris ton deuxième album solo Sol Invictus dans une période assez sombre, 2002 le Black Album avec une critique acerbe, notamment, du pouvoir médiatique, et 2006 est marqué par le titre La fin de leur Monde au titre évocateur … Quel a été le mood d’Akhenaton pour cet album, et quels en sont les principaux thèmes ?

Le mood il est né d’expériences de vie plutôt difficile ou j’ai perdu beaucoup de gens qui m’ont élevé ces dernières années, des gens que j’aimais beaucoup, c’est toute mon enfance qui est partie … Et à la fois une esprit positif est né de ca, c’est à dire qu’on réalise l’importance de choses très basiques, et l’important c’est la beauté qu’il y a dans la vie, le simple fait de se lever tous les jours et de faire des choses super intéressantes, on est tous des privilégiés, on sait qu’on est tous des chanceux, on est « 1 sur 1 milliard » donc déjà de ce point de vue là ca commence comme ca. Et puis on est chanceux de vivre là ou on vit et puis on a beaucoup bougé avec iam ces dernières années et on sait qu’il y a bcp d’endroits dans le monde qui peuvent être plus difficiles. C’est donc un constat sur une société qui peut être parfois amère, parfois critique et parfois acerbe, mais en même temps une position personnelle qui est optimiste et qui est dans la contemplation des choses extrêmement simple de la vie. J’essaye de me satisfaire de peu de choses, et je pense que j’ai été élevé comme ca. Ma mère est très stricte mais avait plein d ‘amour. Elle m’emmenait dans les défilés sociaux, les grands défilés de la CGT contre la guerre du Vietnam, j’avais 5 ans, 6 ans … je me suis pris quelques gaz lacrymogènes à l’époque. J’ai été rodé a ca, a la lutte, après j’ai eu quelques déceptions sur les mouvements dont elle a fait partie, sur le communisme. Tu sais le fait que des tas de communistes passent à l’extrême droite ca se sentait déjà. Tu sentais que les gens pouvaient passer du rouge au brun facilement. Aujourd’hui les gens sur les réseaux sociaux jugent à la louche. Je parlais d’Eric Zemmour mais c’est pas uniquement lui, c’est un ensemble de personnes qui présentent une vision de la vie Manichéenne, ou c’est blanc, ou c’est noir. Sur ce point de vue là on a régressé. Après sur la violence du Monde je pense pas qu’on ait régressé. Alors les gens me disent « oui mais c’est une vision d’ancien qui dit c’était mieux avant » je dis « a non c’était pas mieux avant » le monde était plus violent avant ! La communication sur la violence c’est devenu un outil de marketing, si tu vois un truc violent sur la planète, le monde entier est au courant de lendemain. Mais si tu relis les journaux des années 60 tu te rends compte que le Monde était vraiment terriblement violent, donc je pense qu’au contraire le fait que les journalistes soient présents partout ca permet d’avoir une station de foyers plus paisible, même sur certaines régions du Monde c’est pas gagné.

Le premier album d’IAm est sorti en 1989, on a souvent l’impression en réécoutant tes albums que rien n’a changé, “Jean-Claude Gaudin Skywalker” est par exemple toujours en place… En tant qu’observateur et critique de la société, quel est ton regard sur l’évolution de la société depuis 89, et comment est ce que ca a influence ton album ?

Y’a des mieux et des choses qui ont stagnées voire régressées. Moi j’explique aux gens que je suis pas dans le « french baching » et je ne suis ni l’office du tourisme ni de la France, ni de Marseille, c’est pas la même boutique, je suis pas là pour faire la promo du fromage, du cantal, et des falaises d’Etretat. Au niveau des quartiers il y a eu beaucoup de mieux, mais au niveau de la compréhension et de ce que les hommes politiques ont appelé « intégration » alors qu’ils pensaient « assimilation » et nous on pensait acceptation … ca a été ni l’un ni l’autre, nous on était dans une logique non politique. On fustige, on flagelle le communautarisme, mais on propose aucune solution qui est capable de faire un contre poids au communautarisme. Hier soir j’avais une discussion avec Veust Lyriciste, et il me dit « regarde dans la NBA si il y a un propos raciste qui est dit le mec est viré » et j’en ai parlé dans mes paroles j’ai dit « Ici on ne vire pas le boss des L.A. Clipers, on le paye » et on le paye sur le service public pour dire des conneries sur nous. Pendant des années j’ai entendu des conneries de Finkielkraut a la TV qi disait que l’équipe de France c’était un ramassis de délinquant des cités, j’ai entendu ca et je me disais « ou on est ? » et on disait qu’ils étaient très patriotes s’ils chantaient la marseillaise, mais attends c’est des footballeurs ou des chanteurs ? Faut décider a un moment. Et j’ai été très content de voir le documentaire d’Eric Cantona, ou on voit Michel Platini dire « Attends a l’époque on en chantait pas la marseillaise et personne ne nous emmerdait ! ». Maintenant on est sur ce jugement de l’apparence, sur cette approche très Manichéenne qui est horripilante. On peut se dire qu’on accepte tout en France mais quand la France se fait éliminer dans la poule du Sénégal pendant la coupe du monde en Corée, de suite sur les radios derrière on avait des débats sur les radio « vous reconnaissez vous dans l’équipe de France ? » et ces questions là ce sont pas des questions anodines, et on a pas attendu Zemmour ou Finkielkraut, elles sont ancrées dans une partir de notre population, et si on donne la parole a certains animateurs ou philosophe pour jouer le surligneur dans cet état d’esprit là, dans les urnes ca va se traduire. Ils ont pas peur.

En presque 30 ans aussi, le rap a énormément évolué : il est passé d’un sujet marginal et montré du doigt, a un sujet « trendy » que les marques de luxe, et les médias s’arrachent. Comment analyses tu cette évolution, ce paradoxe et le chemin parcouru ?

Je ne sais pas exactement comment analyser l’histoire, c’est juste le changement de popularité de cette musiques. Il faut comprendre ce qui est inscrit dans les gènes du hip hop : l’expansion font partie du gène de cette culture là. C’est pas une musique de niche. C’est une culture expansionniste, plus il y a de gens qui en écoutent, mieux c’est. Par contre ca comprend un maximum d’artistes, une diversification des publics, et des sujets. Forcément des marques vont comprendre avant les autres que cette musiques s’adressent a un maximum de personnes, et elles vont communiquer dessus. J’avais fais des campagnes avec Adidas parce qu’il y a des marques qui comprennent et qui sont historiquement ancrées dans le hip hop. Il y a d’autres marques qui ne veulent pas que le rap rentre dans leur espace radio et n’entre pas en lien avec leurs publicités, parce que le rap s’adresse a une population qui a leur yeux ne consomme pas on n’ont pas les ronds pour consommer. Quand tu connais les quartiers tu sais très bien qu’il y a pas plus consommateur que les gens des quartiers, mais eux, dans ces marques là on est persuadé que ces gens ne consomment pas donc on dit aux patrons de radio « si tu passe du rap, moi ma pub je te l’achète pas 30 000 mais je te l’achète 15 000 parce que les gens a qui tu t’adresses ils ne consomment pas beaucoup, donc ma pub vaut moins », donc les patrons de radio choisissent de ne pas jouer de rap. On est ni plus ni moins dans la loi du marché.

Tu as dit « le hip hop est devenu pop »

Le hip hop est devenu pop mais ce n’est pas une critique. Il est devenu pop en majorité mais les hip hopers et b boy existent toujours dans le rap mais ils sont ultra minoritaire. C’est obligatoire quand une musique est extrêmement large, mais c’est obligatoire que ca devienne comme ca. Ah les rappeurs sur des instrus de Coldplay … mais c’est obligatoire qu’ils existent ! Tu sais j’ai produit des gamins à l’époque qui avaient 15 ans et qui s’appelaient les psy 4 de la rime, qui s’appellent toujours comme ca mais qui ont 30 ans maintenant, et qui ont grandit avec le top 50, avec de la pop, pour moi c’était risible, je leur disait « moi les groupes que vous écoutiez quand j’étais ado moi c’était des ennemis, a l’époque on voulait dynamiter leurs disques ! » et eux ont grandit avec ca, faut juste accepter qu’ils sont issu d’une culture différente, qu’ils ait grandit avec une musique différente et une approche différente de la mienne.

La deuxième partie de l’interview est disponible en cliquant ici , et là :

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