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Interviews

P.R2B : « J’ai envie de percer les secrets de tous les arts »

A l’occasion de la sortie de son premier EP, TRENDS part à la rencontre de P.R2B, une artiste unique en son genre.

Intense, punk, sauvage, authentique… Nombreux sont les mots qui viennent à l’esprit lorsque l’on cherche à décrire l’univers de P.R2B. Une aventure unique, portée par la chanteuse Pauline Rambeau de Baralon. Native de Bourges, P.R2B est une artiste unique en son genre, inclassable et saisissante. Après s’être fait remarqué avec ses titres « Ocean Forever » ou encore « La Chanson du Bal », elle dévoile aujourd’hui son tout premier EP officiel. L’occasion pour TRENDS de partir à sa rencontre sur une terrasse parisienne.

TRENDS : Tu as fait des études d’images et de son, tu as aussi étudié le théâtre et le cinéma. Finalement, tu choisis aujourd’hui la musique. A quel moment as-tu débuté ? Peut-être y-a-t-il eu un déclic, une rencontre ? 

P.R2B : Je pense que la musique a toujours fait partie de ma vie. Déjà, j’ai commencé par la clarinette étant petite. Ensuite au collège, comme beaucoup, j’ai commencé à apprendre la guitare et le piano. J’ai toujours aimé jouer des instruments. Au collège, c’est aussi le moment où j’ai commencé à écrire des chansons, qui à l’époque ne ressemblaient pas vraiment à celles que je fais maintenant (rires), mais qui racontaient mes histoires actuelles du haut de ma quatrième. Ca passait à la fois par ma pratique d’instruments, mais surtout par les textes, il y avait vraiment cette volonté de raconter des choses. Au début je chantais auprès de mes amis, où je filais des EPs à mes proches, mais c’était un truc très intime et j’ai gardé cette approche pendant longtemps. A côté, il y avait le cinéma, le théâtre, où pour le coup je me suis beaucoup plus formée. Au début, j’avais l’impression que ce que je faisais ressemblait trop à mes influences, à ce que j’écoutais, et il y a un moment, notamment avec ‘Ocean Forever’, où je me suis dit ‘Là c’est mes chansons’, j’avais trouvé mon univers. C’est à ce moment que j’ai décidé de mettre mes morceaux sur Youtube et c’est là que La Souterraine m’a repéré. Il y a un travail de sous-marin qui est là depuis longtemps, le déclic s’est plus fait quand j’ai entendu mon morceau et que j’ai senti que ça ne sonnait plus pareil.

Pourquoi avoir choisi ce nom d’artiste ? Qu’est-ce qu’il signifie ?

Il y a beaucoup d’interviews qui permettront d’apprendre que ce sont les initiales de mon nom, mais c’est surtout quelque chose que je me traîne depuis longtemps parce que mes amis m’appelaient R2B ou Rambo parce que je faisais 20 000 choses en même temps. Déjà j’ai un nom très long, mais j’avais aussi envie d’avoir ce nom de code. J’aime bien, c’est un sorte de truc bizarre, pas genré, et moi-même je suis un mélange de plein de choses, je suis un truc bizarre. C’est des initiales qui renvoient à plein de choses et j’aime bien ce côté libre et flou. J’aime pas m’enfermer dans quelque chose et j’estime que tout mon nom ne résume pas ce qu’est ma musique.

© Marie Stéphane Imbert

Est-ce que cette formation dans l’audiovisuel t’aide aujourd’hui dans le développement de ta carrière ? Dans quelle mesure ? 

Ce qui est intéressant, c’est que c’est un truc sur lequel je me suis assez battue quand j’étais jeune, en tout cas particulièrement en France, parce qu’on a tendance à se former dans une seule chose et à s’y enfermer. Il y a toujours cette question de ‘quel est ton choix ? Qu’est-ce que tu veux faire’. Je pense que pour ma part, j’ai toujours fantasmé cet espèce de savoir où on fait ses armes, on apprend toutes les choses, j’ai jamais fini d’apprendre. Je rêverai d’apprendre des milliers de choses, des milliers d’instruments, tout ça me nourrit. On parle de la musique, du cinéma, mais je sais pas, par exemple je fais de la cuisine et je pense que ça m’aide autant… La curiosité et l’apprentissage, c’est ce qui fait que j’écris des chansons. Outre cette formation, outre mon amour pour le cinéma et le théâtre, je suis avant tout curieuse, j’ai envie de percer les secrets de tous les arts un peu comme un archéologue. 

Cela te permets aussi de pouvoir réaliser tes propres clips, c’est un certain luxe…

C’est sûr, après je crois que j’ai pas forcément envie de tout réaliser et de m’enfermer dans ce truc de « la personne seule qui fait tout ». Mais c’est vrai que c’était important d’amener une identité, une esthétique, pour présenter l’univers de P.R2B. Ce qui est hyper fort c’est que ça ramène toujours des gens, même si c’est moi qui réalise mes clips, je bosse avec des équipes pour tous mes clips, sur Des Rêves il y a plein de comédiens, ça amène des rencontres et c’est génial. J’adore mélanger les arts pour lier les choses, j’aime les gens différents, les musiques différentes, j’aime les mélanges… D’ailleurs j’ai un pull tie & dye, c’est bien la preuve (rires).

Qu’est-ce que ça fait de sortir son premier EP ?

C’est une grande joie, une grande émotion, c’est énormément de travail et je suis hyper fière parce que ces six chansons viennent aussi d’un album qui va sortir. Parce que j’ai tout enregistré en même temps, on les a enregistré en deux mois avec Tristan Salvati. C’est émouvant, parce que ce ne sont pas juste des chansons, ça a été un enregistrement de disque, on a joué des titres, on a fait de la musique ensemble. On a conçu les morceaux pour le live, mais aussi pour l’album. C’est à dire que les orchestrations de l’album ne vont pas être les mêmes que sur les lives, et ça j’aime bien. Il y a un vrai travail de studio, de recherche et d’instrumentalisation avec Tristan, on a vraiment cherché cette texture ensemble. Dans l’oreille, il y a quelque chose qu’on a travaillé comme des fous. 

© Marie Stéphane Imbert

Comment tu imagines le live pour les titres du projet ? 

Maintenant on est quatre, avec trois musiciens avec moi, il y a vraiment quelque chose de très électronique et de très moderne, avec des synthés, des beats qui pourraient être pour la techno ou le rap, des kicks… Avec par contre tout un coeur chaud : de la clarinette, du saxophone, de la trompette… Du coup avec moi il y a un saxophoniste, un bassiste qui fait aussi du synthé, moi je suis au clavier et à la clarinette, donc il y a vraiment ce truc entre l’électronique et la musique accoustique. Il y a quelque chose qui est assez nerveux aussi, le live c’est un moment où on exulte, on est en communion. Donc moi mes concerts se veulent un peu punk tu vois, pourtant quand on écoute Ocean Forever ou la Chanson du Bal on pourrait se dire que voilà… Sur scène, il y a quelque chose de très frontal, on joue vraiment la musique avec des accidents, de l’énervement… J’aime bien ces deux versantes. 

Comment as-tu fait la rencontre du pianiste Tristan Salvati ? Comment tu décrirai cette expérience avec lui ? Sur quels titres avez-vous travaillé ensemble ?

En fait Tristan avait eu vent du projet, notamment avec ‘Ocean Forever’. Et finalement, on s’est rencontrés lors d’un live. J’avais envie qu’il voit en concert, parce que les chansons à l’époque prenaient tout leur sens en concert. A l’époque je faisais du piano, j’avais mes bandes qui passaient, c’était un peu punk. Il est venu me voir en concert au 1999 et on s’est parlés à la fin du concert, on avait très envie de faire de la musique ensemble. Ca a été très fort tout de suite, on s’est donné rendez-vous et on a commencé à travailler ensemble et ça a tout de suite été très fort, on s’entendait très bien et il y avait une vraie alchimie. Moi j’avais aussi cette envie de faire de la musique avec quelqu’un, de pas prendre une tonne de producteurs pour m’aider, je voulais faire le disque et de m’enfermer en studio et pas juste de dire « je reprends mes morceaux et on va bouger des choses ». Tristan avait envie de ça aussi et c’est pour ça qu’on s’est lancés dans cette aventure. C’était drôle, parce qu’on a du faire 12h de studio par jour, à jouer non stop, c’était intensif. Chacun a fait des pas vers l’autre, le but c’était aussi d’avoir une aventure humaine pour que ces morceaux puissent vivre et puissent être dits à quelqu’un avant d’être joués en live. Je pense que c’est aussi ce qui a donné quelque chose de beaucoup plus chauds aux morceaux. 

© Marie Stéphane Imbert

Est-ce qu’il y a des artistes qui t’ont inspiré musicalement parlant quand tu as confectionné ce premier EP ?

C’est hyper intéressant, parce que pour commencer je suis pas quelqu’un qui construit mes morceaux pendant deux semaines et qui les retravaille après, je les construit vraiment sur la durée, au fur et à mesure de ma vie. Donc les films que j’ai vu ont pu être très déterminants par exemple. Je suis quelqu’un qui vit beaucoup avec les images, donc quand je vois un film, je vis longtemps avec, ça me hante. J’ai aussi beaucoup vécu avec des paysages, je me suis pas mal cassée en voiture durant cette période où j’ai construit l’album, c’était l’époque où je sortais de l’école. Ce moment de déplacement m’a souvent amené des idées. Il y a des gens aussi qui, je pense, ont été importants : des réalisateurs, des gens qui ont des univers très complet, comme par exemple Lynch ou Kitano.

Dans « Ocean Forever », tu parles de la grisaille de Paris, de l’envie de la quitter. Mais finalement, n’est-elle pas inspirante, cette grisaille ? 

C’est le paradoxe même des villes folles. Parfois on aime souffrir aussi, ça provoque de l’inspiration. Je reviens un peu de cette idée, parce que je trouve aussi qu’il y a quelque chose d’un peu snob… Et je fais un peu mon auto-critique, mais on est dans une ville où parfois on souffre, mais pas trop, et en même temps on peut se dire « j’ai mon petit lot de tristesse, je peux composer ». Par exemple, dans une période actuelle où on souffre beaucoup justement, on se rend compte que ça ne fonctionne plus cette excuse de la ville qui fait souffrir, parce qu’on souffre déjà. Je pense par contre que des villes sont et resteront inspirantes. Par exemple Paris, ça restera toujours une ville prenante, il y a tellement de gens, c’est un musée des folies : la dynamique de cette ville est flippante. Donc oui, il y a toujours matière à. Je pense néanmoins qu’un lieu seul, ça n’a jamais de sens. C’est quand on le quitte et qu’on revient qu’on se rend compte des choses, c’est quelque chose que les enfants de province connaissent très bien d’ailleurs. 

As-tu un morceau coup de coeur ? 

C’est hard, parce que je les aime tous. Après c’est pas pour ne pas répondre à cette question, mais ce qui est assez intéressant avec cet EP, c’est que tous les morceaux sont liés. C’est bien de l’écouter en entier, parce qu’il y a quelque chose qui peut être nerveux, avec « Des rêves » qui fait des constats et qui peut être assez dure, mais « Le beau mois d’août » a quelque chose d’assez dur et violent aussi. Autour de ça il y a « Dolce Vita », il y a « Le film à l’envers », qui sont beaucoup plus chaudes, beaucoup plus romantiques et finalement je crois que c’est ça que j’aime lier. Les chansons déteignent les unes sur les autres et c’est ça dont je suis le plus fière, les chansons parlent les unes entre elles. J’aime que ce ne soit pas juste des singles, des chansons prises comme ça. Moi dans ma vie c’est un flux continu donc c’est important que les auditeurs sentent aussi cet univers, qu’on rentre dans une histoire et qu’on en sorte et ça je pense que ça me vient aussi de ma formation en cinéma. 

Quelle est idée autour du clip de « Des rêves » ? Que représente ce titre pour toi ? 

Des rêves, c’est une chanson pilier et uppercut, je crois dire 45 fois « je », c’est vraiment un constat que j’ai fait à un moment de ma vie et duquel je ne suis pas trop sortie d’ailleurs… J’avais envie de dire ‘on n’en peut plus’ et en même temps de dire ‘rêvons, il y a de l’espoir’. La fin, ça peut se finir bien, c’est une chanson violente avec une happy end. Le clip, c’est pareil, il y avait cette envie d’amener cet endroit de rêves. Dans ce clip, je commence toute seule et à la fin on est en groupe. P.R2B c’est ça, je commence toute seule, j’écris, je compose, je fais mes clips, c’est quelque chose de très personnel et au final pas du tout. Je crois que ce qui est beau, c’est de ne finir pas seul et d’être avec des gens qui rêvent avec nous. On est tous dans des solitude et en même temps on parle beaucoup du développement personnel, où le « je » prend toute son importance : « comment JE vais m’en sortir », « comment JE peux être heureux », mais finalement on se rend compte que si ON ne s’en sort pas, si ON ne fait pas les choses ensemble, ça va être compliqué. Le titre est hyper fondateur dans ce sens-là, de commencer par le « je », parce qu’on peut pas faire autrement, mais vouloir un « nous » à la finalité. Tout l’EP a cette dimension-là et parle de ça, et c’est que je trouve beau.

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